mercredi 25 juin 2008

Agar Delos, directrice de l'ABDA (Association Bolivienne des acteur), La Paz

Nous retrouvons Agar Delos, présidente de l'ABDA - Association bolivienne des acteurs -, devant le Teatro Municipal (une fois n'est pas coutume!). Elle arrive à dix heures pétantes et nous accueille dans sa petite "oficina" (bureau) à la lumière blafarde. A droite, un mur recouvert de signatures de comédiens. Caro se glisse comme elle peut dans le coin de la pièce, derrière la chaise où elle a disposé la caméra. Il faut bien la cadrer, une Agar Delos sans tête, c'est comme un jour sans cheesecake ! Cette dame d'une soixantaine d'années semble charmée par notre projet et nous répond avec enthousiasme et professionnalisme.

Quand cette association a-t-elle été fondée et quel est son objectif ?
Elle a initialement été créée en 1943, mais elle a été refondée en 1949 suite à quelques petits changements. Cette institution a pour objectif de protéger et de sponsoriser les acteurs afin de leur offrir des lieux de travail de meilleure qualité et une certaine couverture sociale. On a mis en place un local de réunion où les artistes de toutes disciplines peuvent se retrouver, une sorte de petit complexe culturel.

Que pouvez-vous nous dire du travail d'acteur en Bolivie ? Est-ce considéré comme une vraie profession ou plutôt comme un hobby ?
Malheureusement jusqu'à aujourd'hui ce n'est pas un métier valorisé ni reconnu comme étant une profession. Les activités périphériques telles que donner des cours, des ateliers, sont indispensables pour que les acteurs puissent vivre. Maintenant, on a eu beaucoup de résultats positifs au niveau national en ce qui concerne la professionnalisation de ce métier.

Il y a beaucoup de travail dans le milieu théâtral ? Les acteurs attendent les rôles où doivent ils les chercher systématiquement ?
En Bolivie il y a beaucoup de compagnies, de troupes qui ont à leur tête un metteur-en-scène. C'est lui qui fait appel aux acteurs avec qui il a envie de travailler. Comme c'est très compliqué de monter une pièce de théâtre en Bolivie, les metteurs en scène sont véritablement à la recherche d'acteurs. Malgré cela, les comédiens sont obligés de se diversifier, dans le cinéma et la télévision par exemple.

Justement, y a-t-il beaucoup de comédiens qui travaillent pour la télévision ? Et pour la pub ?
Oui, il y en a beaucoup, surtout pour des séries télévisées.
Le cinéma en Bolivie s'est développé dans les années '50-'60 avec l'arrivée de producteurs étrangers (français, espagnols,...) et a permis aux comédiens boliviens de se lancer dans le 7ème art.
Quant à la publicité, je trouve personnellement que cela nuit à l'image d'un comédien : on l'associe à une marque, et sur le plan artistique c'est vraiment mauvais.

Existe-t-il des agences de casting et des agents ?
Il y a surtout des agences de pub qui font le lien, dans le domaine audiovisuel, entre les acteurs et les réalisateurs. Mais il n'y a pas a proprement parler d'"agences de comédiens".

Que pensez-vous de l'école de Santa Cruz ? Croyez-vous que cela soit un moyen de professionnaliser le métier d'acteur ?
Ce qui est bien, c'est qu'on y trouve un enseignement très approfondi non seulement dans le théâtre, mais aussi dans le domaine cinématographique et télévisuel. Beaucoup de comédiens qui sont aujourd'hui célèbres sortent de cette école, notamment Cristian Mercado qui a joué aux côtés de Benicio del Torro dans le film sur le Che qui a concouru à Cannes cette année. C'est vraiment une immense joie pour tous les acteurs boliviens, cela permet une ouverture sur l'international. Nous sommes très fiers.

Connaissez-vous certains acteurs talentueux qui ont quitté la profession ?
Oui bien sûr, surtout des comédiens de l'ancienne génération. Il y en a aussi beaucoup qui sont partis à l'étranger où qui se sont tournés vers d'autres genres tels que la radio-théâtre. D'autres se sont mis à donner des cours.
A mon époque (j'ai commencé le théâtre en 1953) il y avait moins de troupes et les grandes entreprises subventionnaient les artistes plus facilement.

Que conseilleriez-vous aux acteurs boliviens pour réussir ?
De se mettre en contact avec des gens qui diffusent la culture. De ne jamais cesser de s'intéresser à ce qu'il se passe dans le monde de la culture, il y a toujours quelque chose de nouveau à apprendre. Il faut être au courant de l'actualité dans la mesure où tout est en constante évolution. Lire les nouvelles productions littéraires aussi, être tout simplement au fait de l'actualité.

Agar Delos termine l'interview face caméra en nous félicitant de cette initiative. Elle paraît enchantée que les jeunes comédiens puissent prendre la relève de cette manière, en s'intéressant à ce qu'il se fait dans d'autres pays. Elle nous quitte devant le théâtre, un peu émue, et nous sert fort dans ses bras.

Aucun commentaire: