jeudi 28 août 2008

Julio Muñoz, comédien et metteur-en-scène à Concepción


Pour commencer, pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
J'ai fait des études d'ingénieur pendant 3 ans à l'Université technique de l'État. J'avais beaucoup d'amour pour le théâtre mais il n'y avait pas d'activité théâtrale à l'Université. On a créé un groupe dans le but de créer une école de théâtre, pour avoir une meilleure éducation théâtrale et l'enseigner à la population, aussi.
J'ai eu la chance de connaître le gouvernement de Salvador Allende, mais en 1973, avec le coup d'État militaire, mes études d'ingénieur et de théâtre : kaputt !
Ensuit, j'ai donné des cours durant toute la période de la dictature pour pouvoir survivre économiquement.

Pouvez-vous vivre de votre art ?
Oui. Car mon travail a eu beaucoup de succès. Les parents voyaient les progrès de leurs enfants, qui étaient pourtant souvent très timides, et qui devenaient merveilleux sur scène. Ils m'en étaient très reconnaissants. Ceci dit, on est obligé de donner des cours. On ne peut pas vivre uniquement de l'art, car le public est peu nombreux.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Concepción ?
Aujourd'hui, il y a une grande variété de jeunes troupes, issues de l'école de théâtre qu'il y avait et qui a fermé il y a environ un an, et qui se cherchent un public. Ce qui se passe, c'est qu'elles se forment et se dissolvent, ces compagnies, parce qu'elles ne rencontrent pas le succès espéré.
De manière générale, le théâtre - comme tout, d'ailleurs - est centralisé à Santiago. Là-bas il y a du travail pour les acteurs. Ici c'est plus dur de trouver des infrastructures, les théâtres répondent à d'autres demandes des institutions : danse, séminaires, etc...

Parlez-nous de La Cenicienta (Cendrillon, ndlr) ? Pourquoi avez-vous choisi ce conte ?
C'est un projet qui a commencé il y a dix ans, avec un travail d'improvisations d'enfants qui étaient nos élèves. Il s'agit donc d'une reprise, et c'est un grand succès ! C'est toujours plein !
C'est une adaptation du conte original. La proposition a surgi en plein coup d'État, en pleine dictature. On a donc mis-en-scène un roi qui n'avait pas de tête pour gouverner, la décrépitude incarnée, la folie, une sorte de Pinochet pour nous. Son premier ministre est un incapable, lâche et faible qui exécute les ordres. C'était une manière de rire de la dictature.
Cendrillon représente, pour nous, les pauvres, ceux qui ont le plus souffert des persécutions. C'est notre lecture de l'œuvre. A travers le conte, on parle de notre réalité, de nos douleurs.
Et les parents perçoivent bien entendu l'ironie, les allusions. Dans le public il y avait des partisans de Pinochet, mais ils riaient aussi, parce que c'est une manière de prendre le monde avec humour. Le théâtre aussi c'est une manière de parler, non ? De qui nous sommes et de comment nous voyons le monde. En tant qu'artiste, on ne pouvait pas arrêter de faire ce que l'on sentait.
D'autre part, ce conte est transversal, dans le sens où il peut toucher tout type de public. Aujourd'hui bien sûr on a un peu changé le sens : le roi n'est plus le même roi, mais on a conservé l'idée qu'on pouvait rire de l'actualité. C'est plus difficile avec la Bachelet, on ne peut pas trop en rire, c'est une dame magnifique (rires) ! Même si on est pas tout à fait d'accord avec ce qu'elle fait, sa vision du pays et sa manière de gouverner - on voudrait un gouvernement qui soit plus du côté des ouvriers -, on a beaucoup de tendresse et de sympathie pour elle.

Quelles sont vos méthodes de répétition ?
La majorité des personnes qui travaillent dans la compagnie ne vivent pas du théâtre, elles arrivent donc aux répétitions après leur travail, on va alors droit au but.
On commence par un travail d'investigation sur le thème dont on va parler, on en discute tous ensemble et on fait un "catalogue" des idées principales. C'est à partir de là que naît le texte.
Puis on fait des improvisations.
C'est une méthodologie assez traditionnelle, en somme !
On a aussi mis en scène un conte mapuche, et il fallait faire un travail sur leur danse, leur musique, leur poésie. Ce fut très intéressant et enrichissant.
Si on devait se définir, je dirais qu'on vient de l'école stanislavskienne, avec beaucoup d'influences brechtiennes (comme souvent en Amérique latine!).

Selon vous, existe-t-il un devoir de l'acteur ?
Pour sûr, ça ne pourrait pas être autrement, c'est le rôle historique du théâtre dans le développement de l'humanité. Le théâtre a toujours été un espace de contestation. A ses débuts, le théâtre appuyait le système, c'était un élément essentiellement religieux, mais très vite il a questionné la société. Molière, Shakespeare étaient profondément contestataires malgré le fait qu'ils vivaient du mécénat, du roi, du système ! Cela ne les a pas empêché de questionner la vie de l'homme.

Le théâtre doit-il nécessairement être engagé selon vous ?
Il l'a toujours été, historiquement.
Comme tout art, il doit avoir un contenu à défendre : questionner la conduite humaine. C'est la fonction de l'art : nous voir dans la réalité pour pouvoir nous améliorer.

Que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
Du plaisir. Et une réflexion sur sa propre vie, sur la société.
Et puis, c'est de la culture ! Ça nous aide à avoir un point de vue sur la société. Comme Jean Genet en France ! C'était un terroriste de l'art !

mardi 26 août 2008

Mauricio Almuna, chargé administratif du Teatro Ictus, Santiago

Quand fut fondé le Théâtre Ictus, pouvez-vous nous raconter son histoire ?
Je ne peux pas donner de date exacte, elle n'existe pas. Cela fait environ 50 ans que le Théâtre Ictus a vu le jour. C'est la compagnie la plus vieille du Chili, et même d'Amérique latine. Nous travaillons professionnellement depuis 40 ans, elle a acquis une reconnaissance internationale immense. C'est la compagnie qui a marqué l'histoire théâtrale chilienne.
Nous avons un enregistrement, une vidéo, où on voit les fondateurs de l'Ictus rassemblés - je parle ici d'acteurs, de metteurs-en-scène, de dramaturges - qui racontent qu'ils étaient issus de l'Universidad Catolica, donc du théâtre traditionnel, et qu'ils ont dû s'essayer à un théâtre plus expérimental, en se défaisant de toutes les règles des années 45-50. A ce moment-là, le théâtre se référait à des pièces nationales, toujours les même, et ils ont voulu se tourner vers des auteurs plus transgressifs. C'est comme ça que peu à peu s'est montée cette compagnie.
Ensuite, le Chili, comme toute l'Amérique latine, a rencontré de grands changements politico-sociaux durant les années '50-'60, et plusieurs membres du théâtre se sont identifié à une idéologie - de gauche. Ils sont alors allés chercher autre chose, bien plus que le théâtre expérimental ou formel, non, il s'agissait là d'une nouvelle façon de faire du théâtre. Ils ont appelé ça : la création collective. C'est à dire qu'ils partaient tous ensemble d'un thème et à partir de ce thème, ils construisaient une pièce. Ce phénomène théâtral va constituer l'essentiel de la production artistique de l'Ictus.

Et aujourd'hui encore vous travaillez de cette manière ?
Non !! Là, je te parle de la naissance du théâtre, de son histoire. Qui s'inscrit plus largement dans celle du Chili. Je ne sais pas si vous la connaissez, mais c'est fondamental de connaître l'histoire du Chili pour comprendre celle de l'Ictus. Celui qui ne connaît pas l'histoire de ce pays ces 40 dernières années ne peut pas comprendre grand chose à ce qu'est le Théâtre Ictus.
L'Ictus, par sa création collective, a atteint une figuration nationale au sein du pays, car il est arrivé jusqu'au domaine télévisuel. Il y a eu un programme, La Manivela, un programme d'humour social, dans les années '70. L'Ictus traitait d'une thématique sociale et a réussit à l'amener jusqu'à la télévision, par l'humour. Dans ses pièces de théâtre également.
Dans les années '70, la plupart des pièces de l'Ictus sont imprégnées de la réalité sociale ambiante. Puis, peu à peu, la compagnie s'est mise à créer des œuvres avec en ligne de fond un message contestataire. Chacune des pièces s'inscrivait dans un contexte national voire mondial.
Par exemple, la pièce qui se joue en ce moment : Visitando al señor Green, traite du problème de la tolérance, à travers le respect des préférences sexuelles. Cela touche à des thèmes plus larges, comme la famille, l'amour, la solitude. Il y a quelques temps, avec El Grito, il s'agissait de dénoncer la corruption, très présente au Chili. L'Ictus a produit toutes sortes de pièces, Pablo Neruda viene volando, Tres Noches de un Sabado, Pimavera con una esquina rota, etc ... avec toujours un message d'espoir plus ou moins suggéré.
En 1980, Ictus devient le premier producteur indépendant de vidéo. Il va utiliser une forme audiovisuelle pour introduire dans le pays un autre "espace culturel" au moment où ils ferment tous. Ces documentaires, là encore, montraient la réalité sociale et politique chilienne. Ictus "...se transforme alors en une institution, qui à partir d'une vision et d'un engagement artistique, permet une alternative de communication à travers laquelle on peut voir l'interdit et exprimer d'une manière artistique ce que la dictature voulait cacher. " (cf brochure Ictus, un espacio de encuentro) Cela nous a permis d'avoir tout un réseau de liens au niveau national avec les syndicats, l'Église, etc ... On distribuait nos vidéos dans la région. On donnait ainsi aux gens la capacité de survivre pendant la dictature.

Vous semble-t-il nécessaire que le théâtre soit engagé, ou est-ce que ça peut être uniquement du divertissement ?
Non. Il faut qu'il y ait un impact sur le public.
La compagnie Ictus ne fait pas de théâtre "commercial". La volonté première de l'Ictus est que ses œuvres aient un poids. Social, politique, humain. En tous cas, les pièces doivent chercher à dire quelque chose, pas seulement à divertir.

Pour finir, que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
Il doit pouvoir améliorer la qualité de vie. De notre pièce Visitando al señor Green, le public ressort avec un regard changé sur le respect qu'il faut apporter aux préférences sexuelles de chacun. Il faut savoir que ce pays est traditionaliste, ce genre de choses dérange.
Voilà, améliorer la qualité de vie, je crois que c'est cela, la volonté de l'Ictus.

Loco Freddy, "peintre de l'humour", Santiago, Chili


Pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous est venue l'envie de faire du théâtre de rue ?
Je m'appelle Freddy Ormeño, je suis chilien et je vis à Santiago. Je veux faire du théâtre depuis que je suis tout gamin. Ça me passionne. J'ai commencé au collège. Mais c'est en 87, lors de la visite du pape au Chili, que j'ai eu le déclic. J'avais été choisi pour faire un discours. Au dernier moment, le discours a été censuré, et comme je l'avais appris par cœur, j'ai pu faire le discours original. A ce moment-là, je me suis dit : "Je suis fait pour ça".
J'ai d'abord fait partie d'un groupe, puis on s'est séparés. Et je suis devenu "peintre de l'humour". J'ai quitté le Chili pour l'Argentine, où je réussissais à intéresser les gens, puis je suis allé en Espagne. Là-bas j'ai rencontré beaucoup de peintres de l'humour. J'y ai étudié l'anglais (tout le monde sait parler anglais). J'ai fait ça un peu partout, dans la rue, mais aussi dans des espaces prévus à cet effet. Mais mon crédo c'est vraiment la rue. Ce qui me plaît, c'est qu'il faut voir au jour le jour comment ça se passe. Ça fait 24 ans que j'exerce ce métier.

Comment considérez-vous ce que vous faites dans la rue : du théâtre, un one man show ... ?
C'est du théâtre. Mais une autre forme de théâtre : les gens ne sont pas habitués à voir des spectacles dans la rue, donc il faut systématiquement aller les chercher. C'est beaucoup plus difficile. Il y a un risque constant, que les gens s'en aillent. Il faut faire rire, tout le temps. Et quand au final le public est ému, à ce moment-là, il donne de l'argent, il achète mon dvd, etc ... il peut donner énormément à ce moment-là. Parfois le spectacle dure 1h30 ! C'est énorme.

Et les gens restent ?
Les gens restent ! 1h30. C'est le plus long que j'ai pu faire. Et ce n'est que de l'improvisation, moi je n'ai pas de décors comme tous ces humoristes qui passent à la télé. Il s'agit de garder le contact avec les gens.

Est-ce que vous jouez toujours avec les gens qui passent ?
Bien sûr.

Pouvez-vous vivre de votre art ?
Oui. J'ai 7 enfants, et la majeur partie de mes revenus va à ma famille. Je vis dans le centre, alors ... mais oui, on peut en vivre, même si c'est difficile, il n'y a pas d'appui. Tu dois payer pour jouer. Ici, dans ce pays, divertir les gens, si tu es chilien, c'est un délit. Si tu es étranger, tu as un appui du gouvernement. C'est absurde, non ? Moi, je n'ai plus l'autorisation. J'ai été en prison pour ça.

Comment faites-vous pour attirer le public ?
Écoute, cette question a deux réponses. Lorsque je fais ça dans une autre ville où personne ne me connaît, a La Serena, a Antofagosta, c'est plus difficile, si tu commences à parler dans la rue. Ici, les gens savent que je vais jouer. Les gens sont plus accommodants, ils savent que tu vas faire de l'humour. Sinon, je dois alpaguer une personne, puis une autre, jusqu'à ce que le cercle se forme autour de moi. Avec les applaudissements, les passants comprennent qu'il y a un spectacle. Et là le show peut commencer.

Le théâtre de rue est très développé ici, au Chili ?
Non, il n'y a pas beaucoup de monde qui fait ça. Ceux qui sont là sont peu nombreux.

Pensez-vous qu'il y ait un "devoir" de l'acteur ?
Oui, le devoir de l'acteur est de donner toujours le meilleur de lui-même, faire le meilleur spectacle possible, faire son travail, et réussir à gagner de l'argent.

Que pensez-vous que le théâtre de rue puisse apporter aux gens ?
L'humour. Permettre aux gens d'être heureux, ici, dans la rue, sur le moment. Le théâtre en général, le théâtre élitiste, est réservé à un certain public, qui peut payer les places. Avec le théâtre de rue, tu permets à tout un chacun d'accéder à un spectacle. Mais pour que cela marche (le théâtre de rue, la comédie), il faut être un très bon comédien, et ce n'est pas toujours le cas. Le théâtre, c'est Molière, à 100%.

lundi 25 août 2008

María José Contreras, actrice et metteur-en-scène, Santiago de Chile

Pour commencer, pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
En 2001 je suis allée en Italie où j'ai travaillé au sein du Teatro Ridotto pendant 3 ans, à Bologne. Puis, en 2006 je suis revenue au Chili et j'ai intégré la compagnie Del Patio à Santiago.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Santiago ?
Il est en plein changement. Avant il y avait peu de compagnies, aujourd'hui il y a une grande émergence de troupes et de salles de théâtre. Il y en a quasiment 30, alors qu'auparavant il n'y en avait que 5 ou 6.
Il y a du théâtre plutôt "commercial", qui s'apparente au genre de la comédie, du théâtre plus expérimental et du théâtre qu'on pourrait appeler "national", où se jouent les pièces du répertoire.

Les gens vont-ils beaucoup au théâtre ? Est-ce un art populaire ?
Non, pas vraiment. C'est surtout un public instruit, bourgeois. C'est très dur de toucher un public plus général, car le théâtre est un peu hermétique. Et puis le théâtre reste cher pour une majorité de Chiliens, le cinéma leur coûte moitié moins cher !

Pouvez-vous vivre de votre art ?
Oui, mais en complétant avec des cours de théâtre.

Pouvez-vous nous parler de votre pièce Remite Santos Dumont, d'où vous est venu ce désir de partir de lettres trouvées dans un hôpital psychiatrique ?
Ces lettres ont été trouvées en 2001, elles ont été écrites au début des années 1900. J'ai eu envie de les mettre-en-scène parce qu'elles appartiennent à l'histoire du Chili et que c'est une façon de toucher plus de gens.

C'est vous qui avez fait le travail de "montage", d'assemblage ?
Oui, j'ai fait l'écriture scénique à partir des propositions des acteurs. Mon travail a été de trier.

Comment travaillez-vous en répétition ?
Le travail sur le corps a été primordial, c'est avec ça que je commence.

Quelle a été la plus grande difficulté pour mettre ce travail en scène ?
Il y a une une difficulté économique : cela a été difficile d'obtenir des financements et les acteurs et moi-même avons travaillé durant 9 mois presque sans aucun revenu.
Et puis il a fallu "rendre" le contenu des lettres par le travail corporel. La question est : comment traduire cela en langage scénique ? C'est le plus difficile et aussi le plus gratifiant quand on voit qu'on y parvient.

Selon vous, existe-t-il un devoir de l'acteur ? Le théâtre doit-il nécessairement être engagé ?
Oui, surtout dans un pays comme le Chili qui est en train de se développer. Il s'agit de récupérer l'histoire, travail qui a été interrompu sous la dictature. Après vingt ans de silence, il faut reconstituer des fragments d'identité. C'est donc un devoir à la fois éthique et politique. Je ne pense pas que le théâtre puisse être seulement un divertissement, en tout cas ce n'est pas le théâtre que je veux défendre dans mon travail. Avec Remite Santos Dumont, il s'agit de parler de la discrimination et de comment le Chili traite les marginaux.

Pour finir, que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
Beaucoup de choses : le théâtre doit être comme un miroir, il s'agit de parler des Chiliens, aujourd'hui. Et puis c'est aussi une forme de langage, nous sommes en présence de corps, en chair et en os. C'est une véritable communication comparé au monde virtuel dans lequel nous vivons, ou chacun est face à son ordinateur. Le théâtre permet de rendre réelle cette communication : réunir une centaine de personnes dans une salle, et les faire converger vers la scène.







samedi 23 août 2008

Serge Santana, comédien, Santiago de Chile

Pour commencer, peux-tu nous raconter comment tu as eu envie de faire du théâtre ?
J'ai commencé à en faire à 17 ans, au collège. Mais l'envie m'est venue en regardant la télévision, étrange, non ?! Puis, un ami est venu à Santiago pour y étudier le théâtre et je l'ai accompagné.

Peux-tu vivre de ton art ?
Je vis du théâtre, oui, mais pas seulement en tant qu'acteur : je suis aussi ingénieur lumière et metteur-en-scène. C'est très difficile de vivre uniquement du métier d'acteur.

Peux-tu nous parler de la pièce pour enfant El gato bakano que nous avons vue ?
C'est une version libre du conte du Chat botté. L'objectif était d'en faire une adaptation qui plaise autant aux parents qu'aux enfants, une vraie pièce familiale.

Comment réagissent les enfants ?
Ça leur plaît énormément, surtout le personnage du chat !

Peux-tu nous parler du théâtre à Santiago ?
Il y a beaucoup de théâtre ici, mais le problème c'est que les gens n'y vont pas beaucoup. Les chiliens sont pourtant friands de culture, mais les places leur paraissent chères (environ 3'000$, un peu moins de 4€, ndlr).
Je pense qu'au Chili il y a beaucoup de compétences et un bon niveau théâtral. Les artistes sont très engagés dans leur art. Par contre il y a peu de soutien, et le soutien va la plupart du temps aux gens déjà connus...

Selon toi, existe-t-il un devoir de l'acteur ?
Oui : de continuer à travailler dur pour le théâtre, de faire en sorte que le métier d'acteur soit reconnu et respecté au même titre que celui d'ingénieur.

As-tu un rituel avant de monter sur scène ?
Non. Si ce n'est que je me concentre. Mais ce rôle ne nécessite pas une grande charge émotive, comme pour un rôle dramatique par exemple.

Pour finir, que penses-tu que le théâtre puisse apporter aux gens ?
De l'éducation. Pour moi, l'école ne suffit pas. Il faudrait apporter plus de pratique, quelque chose de plus ludique. Il y a quelques ateliers de théâtre dans les collèges, mais c'est vraiment peu.

vendredi 22 août 2008

Felipe Pirès, metteur en scène, compagnie Demi-Plié, Santiago de Chile


Peux-tu te présenter et nous raconter comment t'est venue l'envie de faire du théâtre ?
J'ai 24 ans, je suis comédien et metteur-en-scène. Je ne saurais pas dire comment j'en suis venu au théâtre. On n'a pas toujours une idée précise. On sait que c'est un sacrifice, mais on essaie quand même. Bien sûr, j'ai vu des œuvres qui m'ont donné envie, et j'ai eut envie de faire ça le reste de ma vie. Ici, il est bon de croire qu'il faut faire de la télé. Mais moi je voulais faire du théâtre. C'est ça qui me plaisait. Je voulais que les gens voient ce qu'il y a dans ma tête, donner de l'émotion au public, et le faire réfléchir. Moi je suis sans arrêt en train de penser, tout le temps. Je crois qu'avec le théâtre, on peut participer à "changer le monde". Je suis utopiste, mais je veux y croire.

Peux-tu nous parler du théâtre à Santiago ?
Je crois qu'il y a des gens talentueux à Santiago, des gens qui en veulent, mais que la politique théâtrale n'aide pas, que c'est difficile. Par exemple pour ma pièce El Ser, je suis obligé de m'occuper de tout, de la mise-en-scène, des costumes, de la production, etc ... un acteur doit savoir tout faire.
Aller au théâtre, ici, ne coûte pas cher, mais le public ne vient pas. Une place de cinéma revient à 3800 pesos, une place de théâtre pour adulte est à 4000 pesos, et pour les étudiants : 2500 pesos. Mais cela reste trop cher dans l'esprit collectif. Paradoxalement, ils vont mettre beaucoup plus pour voir le Cirque du Soleil. Il y a un problème d'éducation. Tu demandes à un gamin qui est Pythagore, il connaît. Mais qui est Shakespeare, non.

Peux-tu vivre de ton art ?
Non. Pour ceux qui ne font pas de télé, ou ceux qui ne donnent pas de cours, c'est plus difficile. Cela dit, je crois que c'est possible. Mais beaucoup de comédiens ont un travail qui n'a rien à voir. La situation des acteurs est très précaire, hélas.

Est-ce que ce métier est vu comme un travail sérieux, ici ?
Non, je pense que non. Certaines compagnies font du mauvais théâtre, ce qui décrédibilise les autres. Et de ce fait, on ne trouve pas d'endroits pour jouer.

Quel type de théâtre mets-tu en scène ?
J'ai deux mises-en-scène à mon actif : El Ser, et Abya Yala, encuentros y desencuentros.
J'essaie de donner de l'émotion au public, et de le faire réfléchir. Pour moi, le théâtre est fait pour ça. Aucun besoin qu'il plaise à tout le monde, au contraire. Il faut qu'il y ait un débat.

Comment travaillez-vous pendant les répétitions ?
On travaille d'abord sur le corps. C'est un théâtre physique. Donner à l'acteur une conscience de son corps. Mais c'est surtout avec cette pièce, El Ser. Le plus important, c'est d'être vrai. Au plus proche de la vérité.

Selon toi, est-ce qu'il existe un devoir de l'acteur ?
Bien sûr. Spiderman disait : "Un grand pouvoir implique une grande responsabilité". La responsabilité de l'acteur est sociale, faire réfléchir les gens. Son pouvoir est d'inventer un monde qui n'existe pas. On ne fait pas du théâtre pour soi-même, mais pour changer les choses qui ne fonctionnent pas.

Selon toi, est-ce que le théâtre doit être engagé, ou est-ce qu'il peut seulement servir à divertir ?
Ça ne peut pas être seulement de la diversion. Il faut entretenir une tension, entretenir l'identification ... ça doit être un compromis entre les deux. Mais pas seulement de la comédie ou de la tragédie. Il doit y avoir des conflits de vérité.

Est-ce que tu as un rituel avant de commencer une pièce ?
Se dire 3 fois merde. Mais pour moi c'est surtout un échauffement corporel, et de la concentration.

Que penses-tu que le théâtre puisse apporter aux gens ?

Cela donne la possibilité aux gens de croire en quelque chose, le temps d'une pièce, en un monde qui n'existe pas par exemple. Cela donne de l'espoir.

jeudi 21 août 2008

Ramón Griffero, dramaturge, Santiago de Chile

Pour commencer, pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
J'ai étudié la sociologie. Puis le coup d'État est survenu et je me suis exilé en Europe. C'est durant cette période que je me suis mis au théâtre, c'était pour moi un acte de résistance. L'art était l'unique arme que je me sentais capable d'utiliser.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Santiago ? Quels genres de théâtre peut-on rencontrer ?
Il y a une grande tradition théâtrale à Santiago, très influencée par l'Europe et le métissage. Le théâtre a surgi à partir du moment où les Espagnols sont arrivés : ce ne sont pas eux qui nous ont apporté le théâtre, il est véritablement né avec leur arrivée. Il y a une grande effervescence théâtrale à Santiago (24 écoles), beaucoup d'auteurs contemporains qui cherchent à se différencier de la "culture de marché" en proposant une "culture de l'art".

Pensez-vous que ce soit un art populaire au Chili ? Les gens vont beaucoup au théâtre ?
Le théâtre ne peut pas être populaire, nulle part, jamais. Il n'y a pas assez de lieu ! La télévision, ça c'est populaire. Et puis populaire ne signifie pas : "qui attire un large public", non, pour moi le théâtre populaire c'est un théâtre qui s'inscrit dans l'identité d'un pays, sur le long terme. Les Chiliens aiment la culture mais vont systématiquement vers ce qu'ils connaissent.

Les acteurs peuvent-ils vivre de leur métier ? Et vous ?
Oui, je suis dramaturge et je vis de mon art. Mais aussi grâce à la pédagogie, pas seulement du monde scénique. Il y a des acteurs qui vivent très bien du théâtre seulement.

Comment travaillez-vous durant les répétitions ?
Chaque œuvre nécessite une méthode différente. Mais l'espace, le corps et le texte doivent former une chorégraphie, c'est une véritable poétique de l'espace.

Selon vous, existe-t-il un devoir de l'acteur ?
Non, aujourd'hui l'art et la politique sont séparés, le devoir de l'acteur concerne uniquement son art.

Vous paraît-il nécessaire que le théâtre soit engagé, ou peut-il être un pur divertissement ?
Le théâtre doit toujours être un divertissement ! Il doit convoquer l'émotion et divertir les sens. Il doit être engagé avec l'art, avec une sensibilité, mais plus avec la politique. L'art est infiniment plus universel qu'une affinité politique. Auparavant nous vivions à l'époque des idéologies, aujourd'hui ce n'est plus le cas. Le concept même d'engagement n'existe plus.
Moi je suis engagé dans le développement du savoir, de l'art.

Avez-vous un rituel particulier avant la première représentation ?
Le plus international qui soit : boire du champagne, s'embrasser et dire "Merde" !

Pour finir, que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
La connaissance, le savoir et, ce qui est plus important que tout : de la fiction. Fiction n'est pas l'équivalent du mensonge, mais du futur. Le théâtre doit construire la fiction du lendemain, c'est-à-dire : la réalité.

dimanche 17 août 2008

Giulio Ferretto, Université Playa Ancha, Valparaíso

Pouvez-vous vous présenter et nous raconter votre expérience. Comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
Je suis metteur-en-scène et directeur de la section théâtre de l'Université de Playa Ancha, à Valparaiso. Cela fait 5 ans. A la base, je suis professeur de littérature, j'ai donné beaucoup de cours. Mais j'en suis venu au théâtre car c'était une nécessité pour moi de communiquer davantage avec les gens, les relations humaines m'intéressent profondément. Cela fait 15 ans que je travaille professionnellement dans le théâtre.

Quand est-ce que la section théâtre de l'université a été fondée ?
En 2003. Il s'agissait d'offrir une formation professionnelle, soutenue, et réellement compétente.

Comment se passe la formation ? Quels types de cours peut-on suivre ?
Je travaille sur 3 éléments majeurs : le jeu, le mouvement et la voix. Ça c'est la formation "pratique". Côté théorique, on trouve des cours d'histoire du théâtre. Cela me paraît indispensable d'avoir les deux.

Pensez-vous qu'il soit primordial de suivre des cours pour réussir ?
Oui, cela me paraît très important. C'est un apport indispensable pour être bien dans ce qu'on fait, en paix avec soi-même, et pouvoir connaître une véritable évolution personnelle et individuelle.

Selon vous, au Chili, est-ce que le théâtre est considéré comme un travail "normal" ou comme une activité à part ?
Non, c'est vu comme une profession à part, ce n'est pas "normal" de faire du théâtre. Et c'est un véritable combat, cela coûte cher aux artistes de faire ce choix. C'est compliqué de suivre une formation, cela demande de l'argent, et il y a des problèmes économiques à ce niveau-là. C'est aussi difficile de trouver des espaces pour répéter, pour travailler.

Peut-on vivre de cet art ?
Non, ici au Chili, on ne peut pas vivre de cet art. Il faut travailler à côté. Moi j'en vis, mais pas en temps qu'artiste. Je donne toujours des cours de littérature, par exemple.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Valparaiso ?

Il y a beaucoup de théâtre à Valparaiso. Au XXème siècle, il y a eu beaucoup d'importation théâtrale étrangère, ce qui a donné à Valparaiso une identité propre. On trouve maintenant beaucoup de compagnies privées. Et les jeunes, beaucoup de jeunes qui se lancent, grâce aux écoles de théâtre.

Que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
De la tranquillité, la connaissance, la vérité, un espace de fiction, un espace de critique, un espace de mise en relation entre les gens, et une amélioration personnelle de l'individu.

Que conseillez-vous aux jeunes acteurs pour réussir ?
Travail, patience et exigence.

vendredi 15 août 2008

Alejandro Labarrera et Patricio Diaz, compañía Pausa, Viña del Mar


Pour commencer, pouvez-vous vous présenter et nous raconter votre parcours ?
Notre compagnie s'appelle Pausa, nous venons de la Vème région, de Viña del Mar. Cela fait peu de temps que nous travaillons professionnellement, nous nous sommes rencontrés à l'école de théâtre il y a 5 ans. Comme plusieurs d'entre nous savaient jouer de la guitare et chanter, nous avons axé notre concept sur la musique. Mais il nous arrive aussi de mettre en scène des textes d'auteurs chiliens et internationaux.
Nos pièces sont familiales, magiques, comme des contes. C'est du théâtre musical.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Valparaíso et à Viña ? Quel type de théâtre se joue dans cette région ?
A Viña, il n'y a pas de théâtre. A Valpo, il se développe depuis quelques temps, notamment grâce à l'émergence des écoles de théâtre. Sinon, tout est centré à Santiago, c'est là qu'il y a la "crème de la crème"! Mais il n'y a pas de culture théâtrale.
Ce qui se fait le plus, ce sont les créations collectives. C'est ce que nous faisons : une création populaire. La plupart des compagnies sont constituées de jeunes, mais il n'y a malheureusement pas beaucoup d'unité. Et puis nous n'avons pas beaucoup d'espace disponible. C'est pour cela que nous répétons dans les lieux publics, et aussi pour que les gens voient notre travail et aient envie de venir voir le résultat final ! On voudrait vraiment développer le théâtre ici, à Viña.

Pouvez-vous vivre de votre art ?
Pour l'instant, on est en plein processus de création, donc on n'en vit pas. Je pense que c'est possible, mais c'est difficile.

Vous paraît-il nécessaire que le théâtre soit engagé, ou peut-il être seulement une distraction ?
Les deux sont complémentaires et inséparables. C'est à partir du théâtre que naît la nécessité sociale. Mais le théâtre social nous semble élitiste, si l'on ne fait que ça, dans ce but-là.

Au Chili, le métier de comédien est-il considéré comme un métier comme les autres ou comme une activité à part ?
C'est plutôt considéré comme un hobby, comme une activité alternative. Le gouvernement octroie de petites aides, mais elles sont vraiment minimes. Il n'y a pas de politique culturelle pour le théâtre à proprement parler.

Que pensent vos parents de votre choix (d'être comédien)?
Alejandro : ils sont heureux! Mes deux parents ont fait du théâtre, donc ils sont ravi que je suive cette voie.
Patricio : oui, en fait notre passion nous vient de nos parents, donc ils croient en nos rêves et nous soutiennent.

Que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
Nous vivons dans un monde individualiste, le théâtre peut apporter une sensibilité différente. Ca peut aussi être une forme d'échappatoire. Quoiqu'il en soit, ça produit toujours quelque chose sur le public.
C'est une forme de partage, aussi.

mardi 12 août 2008

Ivan Nogales et le Teatro Trono, El Alto

Pouvez-vous vous présenter et nous raconter votre expérience. Comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
J'ai 44 ans, et je fais du théâtre depuis que j'ai 15-17 ans, j'ai commencé à El Alto, et toute mon activité a été centrée ici. J'ai beaucoup travaillé avec des jeunes de la rue, mais j'ai commencé avec des gens de la mine et des femmes indigènes.
En 1989, nous avons fondé le Teatro Trono, puis l'association Kompa. On a réussi à construire cet édifice à partir de briques et de broques, de matériaux de récupération, au milieu de la Calle de la Cultura ... on a construit le Teatro Camion, qui nous sert pour voyager.
Voici en gros ce qu'est le Teatro Trono, c'est toute ma vie.

Quand a été fondé le Teatro Trono et quel est son objectif ?
Essayer de remplir les trous et les manques en matière de culture. Voilà son objectif. Il y a d'autres compagnies de théâtre ici à El Alto, mais elles ne sont pas stables. Beaucoup naissent et meurent aussi vite. Le Teatro Trono a été fondé il y a 19 ans. Cela dit El Alto est un véritable phénomène, il y a beaucoup d'activités culturelles.

Comment travaillez-vous au sein du Teatro Trono ? Quel est le principe du théâtre forum ?
C'est difficile de cataloguer le Teatro Trono en un style. Il est sûr que l'on reste dans la lignée d'Augusto Boal, et du Théâtre de l'Opprimé. Mais on fait aussi beaucoup de Commedia dell' Arte, et surtout du théâtre interactif.
En bas au sous sol, par exemple, on a construit la réplique d'une mine, et on y introduit le public en lui faisant vivre de vraies situations, afin qu'il assume un rôle. Il devient lui-même acteur.
Le Teatro Trono est politique, il me paraît impossible de faire de l'art pour l'art. Le contexte social nous pousse à être engagés.

Travaillez-vous seulement avec El Alto ou également avec La Paz ?
Seulement avec El Alto.

Et avec les autres pays ?
Oui, nous travaillons beaucoup avec les étrangers, on est invités en Allemagne, en Hollande, on a déjà effectué 14 voyages en Europe, et 5 aux Etats-Unis.

Quel type d'oeuvre mettez-vous en scène ?
Toutes sortes d'oeuvres. Des pièces d'auteur, Shakespeare par exemple, mais aussi et surtout de nombreuses créations collectives, avec des thèmes variés. Cela donne des résultats hétéroclites.

Que pensez-vous apporter aux élèves par le biais de vos ateliers ?
Il s'agit de leur apporter ce qu'on appelle une "décolonisation corporelle". Notre corps est dépositaire de souvenirs, d'une certaine culture, de passions. Nous avons des "codes coloniaux". L'art, et le théâtre notamment, permet la libération intégrale de la personne. Beaucoup de nos élèves se sont libérés en pratiquant le théâtre. Cela a même permis un impact direct au sein de la famille, de la société. Chaque individu se reconnaît en tant qu'une seule et unique personne, bien distincte du groupe. C'est important.

Qu'essayez-vous de dénoncer, et par quels moyens ?
Nous voulons surtout rassembler les gens. De tous horizons : blancs, indigènes, etc ... dénoncer, et permettre un véritable débat avec le public. Cela sert énormément aux jeunes, pendant les ateliers. Il faut partager tout cela avec beaucoup d'autre gens, et disperser nos intervenants un peu partout. On travaille avec 5000 élèves des Altos, imaginez !

Est-ce que ce sont plutôt des enfants ou des adultes ?
Majoritairement, ce sont des enfants. Mais on compte aussi quelques adultes, car il y a de la demande. Il s'agit d'incorporer la scène dans le quotidien de chacun. Mais nous nous sacrifions tous les jours pour réussir un tel impact social.

Quelle est votre plus grande réussite ?
D'avoir réussi à toucher les enfants, à leur faire faire du théâtre. Et aussi à avoir bâti cet empire à partir de rien, avec seulement des matériaux de récupération. C'est presqu'un petit palace. La calle de la Cultura n'était qu'une vaste décharge, il n'y avait rien. De cela je suis très fier.