jeudi 21 août 2008

Ramón Griffero, dramaturge, Santiago de Chile

Pour commencer, pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
J'ai étudié la sociologie. Puis le coup d'État est survenu et je me suis exilé en Europe. C'est durant cette période que je me suis mis au théâtre, c'était pour moi un acte de résistance. L'art était l'unique arme que je me sentais capable d'utiliser.

Pouvez-vous nous parler du théâtre à Santiago ? Quels genres de théâtre peut-on rencontrer ?
Il y a une grande tradition théâtrale à Santiago, très influencée par l'Europe et le métissage. Le théâtre a surgi à partir du moment où les Espagnols sont arrivés : ce ne sont pas eux qui nous ont apporté le théâtre, il est véritablement né avec leur arrivée. Il y a une grande effervescence théâtrale à Santiago (24 écoles), beaucoup d'auteurs contemporains qui cherchent à se différencier de la "culture de marché" en proposant une "culture de l'art".

Pensez-vous que ce soit un art populaire au Chili ? Les gens vont beaucoup au théâtre ?
Le théâtre ne peut pas être populaire, nulle part, jamais. Il n'y a pas assez de lieu ! La télévision, ça c'est populaire. Et puis populaire ne signifie pas : "qui attire un large public", non, pour moi le théâtre populaire c'est un théâtre qui s'inscrit dans l'identité d'un pays, sur le long terme. Les Chiliens aiment la culture mais vont systématiquement vers ce qu'ils connaissent.

Les acteurs peuvent-ils vivre de leur métier ? Et vous ?
Oui, je suis dramaturge et je vis de mon art. Mais aussi grâce à la pédagogie, pas seulement du monde scénique. Il y a des acteurs qui vivent très bien du théâtre seulement.

Comment travaillez-vous durant les répétitions ?
Chaque œuvre nécessite une méthode différente. Mais l'espace, le corps et le texte doivent former une chorégraphie, c'est une véritable poétique de l'espace.

Selon vous, existe-t-il un devoir de l'acteur ?
Non, aujourd'hui l'art et la politique sont séparés, le devoir de l'acteur concerne uniquement son art.

Vous paraît-il nécessaire que le théâtre soit engagé, ou peut-il être un pur divertissement ?
Le théâtre doit toujours être un divertissement ! Il doit convoquer l'émotion et divertir les sens. Il doit être engagé avec l'art, avec une sensibilité, mais plus avec la politique. L'art est infiniment plus universel qu'une affinité politique. Auparavant nous vivions à l'époque des idéologies, aujourd'hui ce n'est plus le cas. Le concept même d'engagement n'existe plus.
Moi je suis engagé dans le développement du savoir, de l'art.

Avez-vous un rituel particulier avant la première représentation ?
Le plus international qui soit : boire du champagne, s'embrasser et dire "Merde" !

Pour finir, que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
La connaissance, le savoir et, ce qui est plus important que tout : de la fiction. Fiction n'est pas l'équivalent du mensonge, mais du futur. Le théâtre doit construire la fiction du lendemain, c'est-à-dire : la réalité.

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