dimanche 8 mars 2009

Alvaro Hernández et l'Entrópico Teatro, Bogotá

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Ok, mon nom est Alvaro Hernández, je suis directeur de l'Entrópico Teatro, c'est un groupe jeune, cela fait 6-7 ans que nous travaillons, et nous essayons de créer notre propre théâtre qui prend ses racines dans beaucoup de traditions du théâtre du monde.
Moi, en tant que directeur, mais aussi les acteurs, avons eu des expériences avec des traditions colombiennes : on a fait un long travail avec les indigènes, les traditions noires et les paysans de Colombie. J'ai baigné en particulier dans l'anthropologie théâtrale d'Eugenio Barba et de l'Odin Teatrett et avec des maîtres asiatiques de diverses traditions, comme le théâtre Nô au Japon.

C'est une sorte de mélange ?
C'est une sorte de mélange mais en réalité, ce n'est pas vraiment un mélange en tant que tel. On a trouvé des principes dans ces différentes traditions, et on travaille donc sur ces principes. Mais on cherche à créer notre propre langage.

Comment vous est venue l'envie de faire du théâtre ?
Je fais du théâtre depuis que je suis gosse. Quand j'avais 12 ans, j'ai commencé à faire du théâtre parce qu'il y avait un de mes premiers professeurs qui était allé à la première session d'anthropologie théâtrale, en 1980, et il revenait d'un voyage en Inde. Il y avait beaucoup de groupes de petites élèves (on était tous petits ! rires), il nous a rassemblé et nous a dit : "j'ai un rêve, j'ai écrit une pièce sur l'Inde et j'aimerais la monter avec vous". La pièce s'appelait L'opéra-pop de la zone Sud et on a monté la pièce, on a fait la musique, j'ai essayé de jouer de la guitare, mais je préférais jouer (rires), et donc, dès lors, j'ai été en contact avec l'anthropologie théâtrale.

Avez-vous déjà regretté d'avoir choisi cette voie ?
Non, pour rien au monde. Ici en Colombie - je crois que c'est difficile partout - mais en Colombie c'est très très difficile parce qu'il est quasiment impossible de vivre du théâtre, donc on fait mille choses en relation avec le théâtre : je donne des cours à l'Université, j'écris,... et la nuit on se réunit pour travailler, à 6h du matin on fait répétitions. Donc de 6h à 8h et après de 18h à 22h, et on travaille le reste de la journée pour pouvoir vivre. Mais je ne regrette pas, non.

Pensez-vous que l'artiste de théâtre ait une responsabilité ?
Il me semble que oui. Il a une responsabilité surtout avec ce qu'il se passe à l'intérieur même du théâtre, avec lui-même. C'est comme une communauté, où on est plus qu'amis pour la sueur qu'on y met, pour les sacrifices qu'on fait.
En plus il y a aussi une responsabilité sociale, montrer la situation, ce qu'il se passe aujourd'hui dans l'actualité. En Colombie - dans d'autres pays aussi, mais la Colombie est un cas particulier parce qu'on est en guerre, depuis que s'est fondé ce pays, la guerre ne s'est pas arrêtée et, en ce moment, on a un gouvernement qui dit qu'il n'y a pas de guerre, mais il y a plus de morts que dans les pays les plus en guerre, plus de mort que la guerre à Gaza, et le gouvernement dit qu'il n'y pas de guerre ! On doit donc être très engagés pour montrer les faits. On veut que le monde sache, que les gens sachent en Colombie. On ne fait pas un théâtre politique, ni pamphlétaire, mais très engagé, oui.

Pour finir, que pensez-vous que le théâtre puisse apporter aux gens ?
Le théâtre peut apporter, d'un côté la joie dans l'âme, un peu de lumière, et d'un autre côté, il peut toucher les esprits, pour que les gens se réveillent un peu du sommeil anesthésiant dans lequel ils sont plongés. C'est pour cela que nous travaillons sur la perception, avec un langage direct, et ce qu'on veut, c'est interpeller le spectateur.

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